Adoption
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- Publication : mardi 2 octobre 2012 07:18
Proposition de loi visant à réserver l’adoption aux couples mariés
Le 10 novembre dernier, le tribunal administratif de Besançon rendait une décision qui allait créer un certain trouble. C’est au nom de l’intérêt supérieur de l’enfant et des avis plutôt concordants des pédopsychiatres que j’ai décidé, comme je m’y étais engagé lors des débats suivant la décision du TA de Besançon, de réserver aux seuls couples mariés la possibilité d’adopter. Je viens donc de déposer une proposition de loi en ce sens visant à supprimer l’article 343-1 du Code civil.
Chaque adoption est la rencontre de deux histoires : celle d’un enfant déjà né, parfois déjà grand, qui n’a pas ou plus de famille susceptible de le prendre en charge, et celle de parents ou futurs parents qui souhaitent profondément accueillir pour toute leur vie un ou plusieurs enfants, en les entourant de toute l’affection nécessaire.
En rapprochant ces deux attentes, l’adoption répond donc aux besoins de l’enfant privé de famille en lui permettant d’en retrouver une, afin qu’il grandisse et s’épanouisse comme adulte.
Mais l’adoption est également une mesure de protection de l’enfance spécifique dépassant le cadre temporel de l’enfance, car elle instaure, par décision de justice, un lien de filiation particulier.
Quel que soit leur lieu de naissance, en France ou à l’étranger, les enfants doivent bénéficier de la protection et des garanties identiques à celles de tout enfant né et élevé dans sa famille de naissance, comme le prévoient la convention internationale relative aux droits de l’enfant du 10 novembre 1989 et la convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale.
Presque 8 000 agréments pour l’adoption sont délivrés chaque année par les présidents de conseils généraux, ce qui porte le nombre total de titulaires à près de 29 000 au 31 décembre 2007. Pour autant, le nombre d’adoptions d’enfants en France stagne depuis plusieurs années et celui des adoptions internationales, qui représente 80 % du chiffre total des adoptions, a chuté de 20 % en deux ans (3 162 en 2007 contre 4 136 en 2005), pour se stabiliser en 2008 (3 260). C’est donc 4 enfants adoptés sur 5 qui naissent à l’étranger. La validité de l’agrément étant de 5 ans, 25 000 candidats agréés étaient dans l’attente d’un enfant en 2006.
Avoir un enfant est un projet de couple, un enfant a besoin d’un père et d’une mère pour s’épanouir. La famille, ce n’est pas un lieu symbolique, c’est le lieu où la société se perpétue non seulement physiquement, lorsqu’on a des enfants, mais aussi sur le plan de l’enseignement de ce qui est essentiel, à savoir les valeurs. La famille est le premier lieu de l’intégration sociale, c’est le couple formé par la mère, le père et qui élève et éduque des enfants. Et ce choix doit être fait lucidement parce qu’il est le fondement même, non seulement de la société d’aujourd’hui, mais aussi de son devenir.
La demande d’adoption par des célibataires représente aujourd’hui trois risques : d’abord, celui d’augmenter le nombre de couples qui ne pourront pas adopter ; Ensuite, celui de la dissimulation d’un couple de même sexe, risque qui entraînera la réticence de nombre de pays d’origine et réduira ainsi le nombre d’enfants à adopter ; Enfin, celui de répondre aux désirs de l’adulte plus qu’au bonheur de l’enfant. Le pédopsychiatre Marcel Rufo qui dirige actuellement l’Espace Arthur, un service de psychiatrie de l’enfant à Marseille, décrypte la paternité dans son dernier ouvrage Dans Chacun cherche un père. Dans Le Figaro, du 25 novembre 2009, il s’exprime : « L’adoption par des célibataires est plus difficile car il y a le risque de la fusion avec l’enfant. Ce qui compte dans l’éducation de l’enfant, c’est la relation en trio. »
La décision du tribunal de Besançon a créé un trouble certain. Si une personne célibataire ne peut être discriminée en fonction de sa race, de sa religion ou de son comportement sexuel, l’intérêt supérieur de l’enfant doit néanmoins être absolument prioritaire. Dans un arrêt Fretté/France du 26 février 2002, relatif à un refus d’agrément, la Cour européenne, après avoir relevé l’absence de consensus parmi les États sur l’opportunité de permettre à un célibataire homosexuel d’adopter et la nécessité de laisser aux États une marge d’appréciation importante, a jugé que : « L’adoption est de « donner une famille à un enfant et non un enfant une famille » et l’État doit veiller à ce que les personnes choisies comme adoptantes soient celles qui puissent lui offrir, sur tous les plans, les conditions d’accueil les plus favorables.
C’est donc au nom de cet intérêt supérieur de l’enfant et des avis plutôt concordants des pédopsychiatres qu’il est proposé ici de réserver aux seuls couples mariés la possibilité d’adopter.
Commentaires de la proposition de loi
La publication sur le blog de Christian Vanneste de sa proposition de loi réservant l’adoption aux couples mariés a suscité un nombre inhabituel de commentaires.
La diffusion de cette initiative sur de nombreux sites homosexuels, à commencer par celui du magazine Têtu, et sur d’autres sites en faveur de l’adoption par des homosexuels, dont le blog de l’UMP http://ump-blog.fr/actualite/mr-vanneste-recommence/ a suscité un nombre important de commentaires dont la plupart émanent de femmes célibataires, se déclarant le plus souvent hétérosexuelles, ayant adopté.
L’argument généralement avancé en faveur de l’adoption par un célibataire est que mieux vaut pour un enfant un parent qui l’aime que deux qui le maltraitent.
Il est malheureusement vrai que d’avoir un père et une mère ne met pas nécessairement à l’abri de la maltraitance, mais la conclusion qu’en tirent les commentateurs est un sophisme analogue à celui qui justifierait une suppression des limitations de vitesse par le fait que des accidents sont provoqués par des conducteurs qui les respectent, alors que d’autres qui ne le font pas n’ont jamais d’accrochages.
Les pseudo conséquences, telles que l’interdiction du divorce pour les couples avec enfants ou la séparation des enfants d’avec le conjoint survivant que certains tirent de la proposition de loi sont des absurdités qui ignorent la distinction logique fondamentale entre le général et le particulier. Depuis Aristote, on sait pourtant que la loi ne peut viser que l’intérêt général, qui est en l’occurrence que les enfants aient un père et une mère. Elle doit être la même pour tous, en fonction du statut – mariage ou célibat – choisi par chacun, et sans tenir compte des comportements particuliers d'ailleurs changeants au cours de la vie. C'est l'équité qui doit par ailleurs tenir compte des accidents de cette vie. Elle peut certes adapter la loi aux cas particuliers, sans toutefois admettre que ceux-ci puissent inverser le but et la justification de la loi.
Lettre N° 59 – Décembre 2009.