Des réalités cachées
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- Publication : mercredi 17 octobre 2012 08:44
Les femmes devant le déclin démographique
Le texte qui suit est celui de l'intervention de Christian Vanneste, en ouverture du colloque
Les femmes devant le déclin démographique, qui s'est tenu à Paris, le 28 mai. Les Actes du colloque peuvent être commandés à l'Institut de Géopolitique des Populations, 20 rue d'Aguesseau, 75008 Paris, avec un chèque de 12 €.
Je suis ravi de vous accueillir aujourd’hui pour participer à ce colloque organisé par Yves-Marie Laulan au nom de l’Institut de Géopolique des Populations. Je dois vous dire que je connais Yves-Marie Laulan parce que j’ai eu grâce à lui un grand plaisir de lecture. Un jour, je suis tombé sur Les Nations suicidaires. Cette lecture m’a beaucoup marqué. Je l’ai trouvée extrêmement juste, pertinente et alarmante. Comme elle correspondait à des inquiétudes qui naissaient en moi, je remercie encore Yves-Marie Laulan d’avoir écrit cet ouvrage. Je suis particulièrement heureux qu’il puisse donner cours à ses réflexions et aux vôtres au cours du colloque de ce jour.
C’est un colloque qui porte sur les femmes et sur le déclin démographique, en posant la question politiquement incorrecte de savoir si les femmes sont responsables ou coupables de ce déclin démographique.
Inutile de vous dire que, politiquement, je ne m’associe pas du tout à ce type de questions. J’ai fait un peu de philosophie dans mon jeune temps. Rappelons le problème essentiel qui se pose à tous les politiques – j’en suis et vous en avez été un peu aussi, Yves-Marie Laulan, me semble-t-il – de Platon à Ségolène Royal : la politique, c’est établir un ordre juste. Mais le problème est que qui dit ordre dit hiérarchie et qu’aujourd’hui, quand on dit justice, on sous-entend toujours égalité.
Il y a donc un choc frontal entre ces deux notions. Dans la tradition, on avait toujours essayé de fonder l’ordre sur les différences et en montrant que ces différences justifiaient une certaine inégalité ou, tout au moins, une répartition équitable – ce qui ne veut pas dire identique. C’est plus difficile de nos jours, notamment parce que l’une des différences sur lesquelles on s’appuyait le plus souvent était précisément la différence des sexes.
Notre époque se caractérise par le refus de l’inégalité. C’est un combat de tous les jours. Il y a même un organisme, sur lequel je planche en ce moment puisque j’ai une mission d’enquête sur les Hautes Autorités Administratives Indépendantes, dont la HALDE qui est précisément chargée de lutter contre les discriminations et pour l’égalité.
C’est une revendication très forte de notre époque. Le problème est que notre société a tendance à confondre le refus de l’inégalité avec la négation de la différence. Ce n’est pas tout à fait pareil, même si Rousseau, dans le Discours sur l’inégalité,a introduit la confusion entre les deux questions.
Nous en sommes là. Cette question se pose aujourd’hui d’un bout à l’autre de la réflexion humaine. L’un de ceux qui pose le mieux la question est le pape Benoît XVI lorsqu’il s’attaque au relativisme. Qu’est-ce que le relativisme ? C’est précisément la volonté, quasiment entropique, de nier toutes les différences, de nier les sommets et les vallées, de dire que tout est égal, que tout se vaut et, par là même, qu’il n’y a plus aucune différence.
Le problème n’est pas nouveau. La question qui nous réunit aujourd’hui avait en effet déjà été abordée par Aristophane dans deux pièces. Dans la première, Lysistrata, Aristophane faisait dire aux femmes : « Pour arrêter la guerre à laquelle les hommes se livrent sans arrêt, il faut que nous nous refusions à nos maris. Ils arrêteront ainsi de faire la guerre. »
Il y a deux aspects intéressants. D’une part, les femmes prennent l’ascendant sur les hommes en leur dictant leurs lois. D’autre part, il y a l’affirmation de la différence entre la vocation militaire, guerrière, belliqueuse des hommes et, la volonté, le désir pacifique et maternel des femmes.
D’une certaine manière, le problème de l’inégalité et de la différence est posé dans cette pièce. Dans une autre pièce, L’Assemblée des femmes, les femmes prennent carrément le pouvoir et font des lois. Je m’arrête là parce qu’Aristophane est un peu misogyne : les lois votées par les femmes ne sont absolument pas adaptées aux problèmes.
Je voudrais attirer votre attention sur le fait que notre époque est surtout marquée par la rencontre de deux idéologies qui paraissent appartenir au passé.
La première est le marxisme. Certains pensent qu’après la chute du mur de Berlin, le marxisme a disparu du paysage. Pas du tout. La mécanique marxiste, d’origine hégélienne, est toujours présente. Elle consiste à dire que ce qui caractérise les rapports humains, ce n’est pas la complémentarité, ce n’est pas l’harmonie, c’est la lutte entre le supérieur et l’inférieur.
La logique de l’histoire est que l’inférieur l’emporte sur le supérieur. En remplaçant les classes par les sexes, on retrouve la logique du féminisme exalté des extrémistes. Dans le temps, on disait : l’économie appartient à l’industrie et l’industrie appartient aux prolétaires parce que ce sont les prolétaires qui créent la richesse. Aujourd’hui, on dit : l’humanité appartient aux femmes parce que ce sont les femmes qui créent l’humanité, parce que ce sont elles qui l’enfantent. À la limite, elles pourraient presque se passer des hommes, à condition d’apporter quelques progrès technologiques et médicaux.
Ceci rejoint une autre idéologie que l’on évoque un peu moins – c’est dommage parce qu’elle est triomphante –, c’est le culturalisme. Dans le fond, le culturalisme tend à nier complètement la dimension biologique, génétique, naturelle de l’humanité pour prétendre que tous nos comportements sont dictés par l’éducation, par l’environnement culturel et que nous ne sommes des hommes et des femmes que parce que l’on nous a appris à être des hommes et des femmes, ce qui, dans le fond, n'est pas inscrit dans la nature.
Dire ceci paraît énorme. Pourtant, cela se trouve dans des ouvrages extrêmement précis que je cite rapidement. J’avais lu avec beaucoup d’intérêt l’ouvrage de Margaret Mead, qui a été un des phares dans ce domaine, Mœurs et Sexualité en Océanie. Elle y montre que les femmes mundugumor sont de « véritables mecs », capables de tuer leurs enfants, les mâles, à la naissance parce que, dans cette société, c’est plus difficile d’être un homme que d’être une femme, tandis que les hommes Arapesh sont d’une gentillesse maternelle qui saute manifestement aux yeux.
Tout cela est parfaitement culturel. Inutile de vous dire que Margaret Mead, qui a été très critiquée, a donné naissance à d’autres pensées de ce type, comme chez Simone de Beauvoir dans Le Deuxième Sexe ou chez Élisabeth Badinter, qui défend les mêmes idées. J’ai lu d'elle, il y a bien longtemps, L’Amour en plus qui défend une thèse identique. On est femme uniquement par le conditionnement social, on est mère uniquement par le conditionnement social. « On ne naît pas femme », comme disait précisément Simone de Beauvoir, « on le devient ».
À mon sens, ces deux idéologies ont gagné la bataille des idées et des mots. Apparemment, elles sont mortes, mais, en fait, elles sont mortes parce que, tout simplement, elles ont gagné. Toutes leurs idées sont présentes aujourd’hui. Par exemple, dans les débats parlementaires, nous avons voté dernièrement – j’étais l’un des quatre ou cinq membres de l’UMP à ne pas voter ce texte – la clause de l’européenne la plus favorisée.
Comment voulez-vous aujourd’hui vous opposer à une loi pareille ? Ce texte n’est d’ailleurs pas une loi, mais a une portée purement déclarative. C’est un texte de résolution, et non pas de loi. Que dit cette clause ? À chaque fois qu’un texte sera plus avancé ou plus en progrès en Europe, nous devrons l’adopter. Application simple : lorsqu’un pays permet l’avortement plus tard pendant la grossesse, c’est cette règle qu’il faut adopter tout simplement parce qu’elle est plus avancée en ce qui concerne la liberté féminine.
J’ai parlé de l’avortement. Chacun aura remarqué qu’entre la loi Veil et aujourd’hui, l’avortement, qui était un droit de la détresse, est devenu un tabou. On n’a plus le droit de contester le droit à l’avortement parce qu'il est l’expression la plus forte de la liberté féminine.
Il y a quelques années, j’ai rencontré un exemple typique de ce problème lorsque j’ai apporté mon soutien à mon collègue Garraud qui avait défendu l’idée de l’IIG (interruption involontaire de grossesse) qui prend en compte la situation d’une femme qui perd un enfant du fait d’un autre ; par exemple, lorsqu’un conducteur alcoolisé provoque un accident et fait perdre malheureusement son enfant à la femme qui le portait.
Nous avons été violemment attaqués pour avoir défendu cette idée, comme si nous étions des criminels de nous attaquer non pas à l’auteur d’un accident, mais à la liberté de la femme d’avorter. Nous remettions en question un véritable tabou. La femme victime d'une IIG ne devant pas être reconnue pour que soit affirmée pleinement l'absence de droit à la vie du fœtus et le droit de la femme à l'IVG
Certains vont très loin dans cette victoire des idées et des mots. Aujourd’hui, certains auteurs cultivent l’idée que nous sommes dans un monde féminin. Un auteur, qui fait beaucoup parler de lui en ce moment, Éric Zemmour, n’a pas écrit Le Deuxième Sexe, mais Le Premier Sexe. Il y explique que toutes nos valeurs sont devenues des valeurs féminines. Ce n’est pas le sujet d’aujourd’hui, mais il y a, par exemple, tout le problème du risque et de la précaution.
Le risque est une valeur masculine dans notre tradition culturelle – je ne dis pas que c’est dans nos gènes. La précaution est une valeur maternelle, féminine. Aujourd’hui, on constate que la précaution l’emporte d’une manière tellement forte qu’elle s’est imposée dans la Constitution. Un autre auteur, Michel Schneider, a écrit un ouvrage que je vous conseille, Big Mother.
Ce changement en accompagne un autre, celui de l’image véhiculée par la littérature, le cinéma, etc. Des images présentent aujourd’hui les femmes comme porteurs – porteuses ou « porteures » ? – de valeurs masculines. Par exemple, Banquelos, la femme du couple d’Assassins nés, est encore plus violente que son mari. La scène où elle tue un homme d’une façon particulièrement violente est manifestement l’affirmation de valeurs non féminines mais imposées sur l’idéal d’une femme.
Manifestement, il y a un problème. Ces idées ont gagné dans l'espace idéologique. Mais elles n’ont pas du tout gagné dans la réalité. En effet, la situation des femmes est encore, dans la réalité, profondément inégalitaire. Les femmes ont des revenus moins importants que les hommes. Elles sont souvent dans une situation de plus en plus précaire. Les familles monoparentales ne concernent pas un homme avec ses enfants, mais une femme qui, la plupart du temps, a été abandonnée avec ses enfants. L’accès à l’emploi et à la responsabilité politique est aujourd’hui toujours très difficile pour les femmes.
J’attire votre attention sur ce décalage entre l’idéologie, ce qui se passe au niveau des idées, et ce qui se passe dans la réalité concrète où la femme n’a pas tellement avancé dans sa situation, que ce soit par rapport aux études qu’elle suit ou par rapport au niveau auquel elle accède.
Cette situation ambivalente se combine avec le problème qui nous réunit aujourd’hui : la dépression démographique. Ce problème est beaucoup plus important que celui que je viens d’évoquer. Il concerne en effet tout simplement la survie de notre société, de notre civilisation – et de l’humanité, comme j’ai eu le malheur de le dire une fois.
Il est vrai que le problème est compliqué. Je me tourne vers les démographes présents dans cette salle. Les chiffres montrent que les Allemands semblent avoir conservé, dans leur pattern de comportement, l’idée que la femme-mère doit avant tout être mère. C’est pourquoi elles vont moins vers le travail. Mais, curieusement, elles ont aussi très peu d’enfants parce qu’elles ne combinent pas travail et enfantement. Les Françaises, qui travaillent beaucoup, ont curieusement aussi beaucoup d’enfants – un peu plus que les autres, en tout cas. Elles en ont suffisamment, semble-t-il, pour assurer le renouvellement de la population. Le problème est de savoir – je suppose que vous en parlerez aujourd’hui – s’il s’agit d’une réalité ou d’une illusion.
La réalité serait que nous avons voté une excellente loi en 2003 qui a produit ses effets. Démographiquement, nous nous renouvelons. Peut-être que le démographe – je pense à Mme Tribalat – dira qu’il faudrait revoir les chiffres de l’immigration. C’est peut-être aussi de ce côté-là que se trouve la solution.
Pour conclure, à mon sens, deux problèmes se posent dans notre société. J’espère que vous allez contribuer aujourd’hui à répondre à ces problèmes. Le premier problème concerne notre avenir démographique et la lutte contre la diminution de la population, certes, mais aussi surtout le vieillissement de la population, qui se voit moins mais est beaucoup plus pesant. Pierre Chaunu disait que le monde est condamné si la femme répudie son désir d’enfant.
Le deuxième problème réside dans notre capacité à faire – c’est le moment ou jamais – deux mariages. On ne peut aujourd’hui parler raisonnablement du comportement humain qu’en mariant la génétique et l’éducation. Il faut en finir avec la logorrhée culturaliste. Regardez toutes les bêtises qui ont été dites, par exemple, sur un problème aussi important que l’autisme, tout ce que Bettelheim a pu raconter sur la responsabilité des mères dans la maladie autistique. On sait aujourd’hui que la génétique a la plus grande part dans ce type de maladie, qui n’est pas une mais qui a des formes extrêmement différentes. Le comportement a certainement sa part, mais pas exclusivement, dans ce type de maladie.
Le deuxième mariage est celui de l’égalité et de la différence. Personnellement, je pense qu’il est possible de faire en sorte que la revendication des femmes à l’égalité des droits se marie avec une reconnaissance de la différence des sexes, de la complémentarité des sexes.
En tant que président de Famille et Liberté – c’est aussi à ce titre que je suis parmi vous –, j’estime que la famille traditionnelle est certainement le lieu de vie où ce mariage de la complémentarité et de l’égalité se réalise le mieux.
Christian Vanneste
Famille et Liberté - Lettre n° 63 - Décembre 2010
Le chiffre des naissances en France 2006 selon l’INSEE : la vérité
Yves-Marie Laulan, président de l’Institut de géopolitique des populations, nous donne sur cette question le point de vue qu’il aurait exposé lors de la réunion du 7 mars, s’il n’avait été empêché, au dernier moment, d’y participer.
Le 16 janvier dernier, l’INSEE diffusait largement dans les médias une information fracassante à l’occasion de la publication du « Bilan démographique 2006 ».
Selon ce communiqué, la France, avec 830 000 naissances, se situait au tout premier rang des pays européens pour la natalité. Et cet organisme y voyait le signe manifeste d’une reprise encourageante de la natalité dans notre pays, fruit d’une politique familiale heureuse poursuivie avec ténacité depuis des années.
Jusqu’ici, il n’y a évidemment rien à redire. Ceci étant, il est clair que des statistiques de cette nature exigeraient de la part de l’INSEE un complément d’explication qui permettrait aux Français de se faire une idée plus exacte de la nature du phénomène démographique en cours dans notre pays. Les conséquences, à terme, en seront, nul ne peut en douter, très considérables sur divers plans, notamment politique et religieux.
La situation démographique de la France peut s’analyser objectivement comme ci-après.
Il est exact que la France a enregistré l’an dernier un surplus de 20 000 naissances. Mais il faut savoir que ce surplus est dû à hauteur de 50 % aux jeunes femmes en âge de procréer appartenant aux ménages immigrés en provenance de Turquie, d’Afrique noire et du Maghreb. La politique familiale, quelles que soient ses vertus, a peu de choses à voir là dedans.
En second lieu, il importe de savoir également que les naissances des ménages provenant de ces trois pays (ou régions) représentent déjà environ 17% du total des naissances métropolitaines (20 % avec l’Outremer) et devraient, si cette tendance devrait se poursuivre, représenter jusqu’à 30%, du total des naissances en métropole en 2030. A cette date, plus du quart des jeunes Français serait d’origine immigrée ou étrangère dont une majorité sous l’influence, au moins culturelle, de l’Islam.
En dernier lieu, il convient de savoir que l’Insee obtient ces chiffres en incorporant (mais le lecteur ingénu ne le sait pas) les naissances provenant des DTOM). Pourquoi pas. Mais il faut l’indiquer clairement. Ce qui n’est pas le cas.
Pour résumer, les naissances métropolitaines de souche européenne se ramènent à 663 000 en 2006. On est loin, des chiffres triomphants de l’INSEE de 831 000 naissances (la différence, considérable, est de 168 000).
En fait, la France est dans la discrétion et le silence, en train de changer la nature de sa population. Et les Français ne s’en doutent pas. Bien mieux, ces ménages d’origine étrangère formant naturellement les gros bataillons des familles nombreuses, les Français financent directement, sans s’en douter, leur propre disparition, par le truchement des allocations familiales. C’est, sans doute, ce que l’INSEE (et l’UNAP) considèrent une politique familiale efficace.
Mais pourquoi pas ? Cette substitution de population pourrait, après tout, être en soit, un facteur éminemment favorable. Mais à condition que notre pays se montre en mesure d’intégrer ou d’assimiler convenablement tous ces nouveaux petits Français. Ce qui n’a guère été le cas jusqu’à présent.
La campagne présidentielle aurait été évidemment une bonne occasion de le faire. Mais il est à craindre que des informations de cette nature restent en dehors de débats forcément politiques, et donc forcément prudents. Il ne faut mécontenter les électeurs potentiels.
Commentaire des chiffres de l’INSEE sur le nombre des naissances de 2006
I Le coup de clairon de l’INSEE
« La France championne d’Europe de la natalité avec 831 000 naissances » en 2006 pour un indice de fécondité de 1,97 enfant par femme.
Ces chiffres triomphants sont repris par tous les médias.
II La réalité [1]
Il y a trois correctifs à apporter à ce tableau trop séduisant qu’il convient de ventiler.
A Partons du total : 831 000
moins l’Outre- Mer (DOM/ TOM) : 34 000 naissances
= 797 000 naissances pour la France métropolitaine seule
B la France métropolitaine donc : 797 000 naissances :
- moins les naissances de mères étrangères et d’origine étrangère majoritairement musulmane (Maghreb, Turquie, Afrique noire) [2]
135 000 (17% du total des naissances)
= soit 169 000 (Outre Mer + mères étrangères) [3]
= ou encore, au total : 831 000 – 169 000 = 663 000 pour la seule population métropolitaine de souche européenne.[4]
C Quant au surplus de 20 000 naissances enregistré en 2006. Il est dû :
- à hauteur de 10 000 naissances aux jeunes femmes immigrées entrées en France les années précédentes
- à hauteur de 10 000 naissances seulement à des Françaises plus de 30 ans, conformément à un phénomène de rattrapage tardif (première naissance après 30 ans) constaté également chez nos voisins européens.
D L’indice de fécondité réel ? On ne sait pas : 1,97 selon l’INSEE, probablement 1,86 selon Jacques Dupâquier [5]
III Pourquoi probablement ?
En raison de l’abandon (par l’INSEE avec Lionel Jospin) du recensement en 2002.[6] La France ne connaît plus sa population avec précision (à 1 million ou 1,5 million près).
En conséquence, en matière de fécondité, on connaît le numérateur avec précision : le nombre des naissances ; mais le dénominateur, le chiffre de la population, est un à peu prés, vraisemblablement sous-estimé.
IV Conséquences.
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Sans une connaissance précise de la population française, il s’opère dans le silence un changement graduel de la composition démographique de la France : à un taux de croissance de 3 % l’an, la part des naissances d’origine africaines ou turque devrait atteindre 18 % en 2008, 23% en 2020 et 30 % en 2030 (selon Jacques Dupâquier)
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Il ne faut pas se voiler la face : les conséquences en seront considérables sur le plan social, économique et naturellement religieux (avec la montée en puissance du fait musulman).
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Les Français sont placés devant une situation démographique qui leur échappe. Les statistiques ne sont pas fausses. Mais elles sont publiées sous une présentation fallacieuse qui endort l’opinion.
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La conclusion à tirer de cette progression rapide des naissances d’origine étrangère est qu’il faut réussir, et sans tarder, l’intégration, et même l’assimilation de ces jeunes présents et surtout à venir. Sinon les Français risquent de vivre dans les années à venir dans un pays perpétuellement déchiré par des conflits internes, une France malheureuse.
Yves Laulan
Sources : Jacques Dupâquier, Institut de France et Philippe Bourcier de Carbon, INED
[2] Issues de ménages dont l’un ou l’autre conjoint est originaire de l’un de ces trois pays (définition de l’INSEE)
[3] Soit 20 % de la population métropolitaine de souche européenne
[4] Notons que cette population comprend quand même, au surplus, des personnes de confession musulmane originaire d’autres pays que les trois pays cités (Turquie, Maghreb, Afrique noire)
[5] En fait l’indice de fécondité de la population métropolitaine de souche européenne serait encore plus faible, de l’ordre de 1,71 enfant par femme. (Bourcier de Carbon, « Peut-on se satisfaire de la natalité en France », l’Harmattan, 2006, p.85
[6] Remplacé par des enquêtes partielles portant sur 8 % de la population
La famille, une affaire publique
Depuis trente ans le renouvellement des générations n’est plus assuré dans notre pays, en dépit d’une immigration intense. Pendant toute cette période quelques esprits faux, relayés complaisamment ou niaisement par une large part des médias et par la majorité des politiques, ont soutenu, contre toute vraisemblance, qu’il n’en était rien et que ce qui comptait en démographie, c’était la descendance finale.
Les mêmes esprits faux ajoutaient généralement, à l’usage de ceux qui osaient prétendre le contraire et dénonçaient la dégradation de la politique familiale, qu’en toute hypothèse le taux de natalité ne dépendait pas des compensations accordées aux familles pour élever leurs enfants. Ils étaient écoutés avec bienveillance par les politiques à qui cela donnait bonne conscience pour détourner le budget des allocations familiales.
Cette année quelque chose a changé, dans notre pays et en Europe, car tous les autres pays européens connaissent aussi un déficit démographique, souvent pire que le nôtre :
La Commission européenne a reconnu, en mars, l’urgence « de mesures novatrices de soutien de la natalité ».
Un rapport intitulé La famille, une affaire publique dont les auteurs sont Michel Godet et Evelyne Sullerot pour par le Centre d’Analyse Economique(1) remet les pendules à l’heure et rappelle en particulier le lien entre la croissance économique et le dynamisme démographique.
Ce retournement auquel nous appelons depuis la création de notre association rencontrera des résistances et des obstacles. Le sujet du baccalauréat sur lequel nous revenons dans ce numéro est un exemple de ces résistances. Il est, d’une certaine manière réconfortant qu’elle ait réunis le ministère de l’Education nationale et Le Monde, dans la même dévotion scolastique des penseurs de mai 1968.
L’obstacle est évidemment celui que des intérêts de tous genres dressent devant ceux qui veulent réformer réellement la politique familiale.
Je ne sais si M. de Villepin, lors de Conférence de la famille, l’a contourné ou est passé dessous. En tout cas, la modestie des décisions arrêtées montre qu’il ne l’a pas sauté.
(1) le rapport sera publié par La documentation française fin octobre. Son résumé peut être téléchargé sur la page Accueil du site du CAE : www.cae.gouv.fr
Famille et Liberté - 2005
La démocratie déséquilibrée
La démocratie déséquilibrée, par Christian Marchal
La démographie actuelle est à la fois la cause du déséquilibre évoqué dans le titre et l’objet de ce livre de Christian Marchal, enrichi de collaborations de Jacques Bichot, Philippe Bourcier de Carbon et Bernard Legris.
Cet ouvrage remet en cause la théorie du retour spontané à un équilibre démographique, après la période de transition actuelle marquée par la réduction des taux de natalité et de mortalité. Inspirée des travaux de Franck Notestein, démographe américain des années 30, en oubliant de rappeler qu’à ses yeux le retour à la stabilité n’était qu’une hypothèse parmi d’autres, cette théorie présente l’avantage pour les politiques de les dispenser d’agir.
Les auteurs montrent qu’il est au contraire urgent de le faire et que cela est possible par une politique familiale courageuse. Ils montrent également que la prétention européenne de combler le déficit démographique par le recours à une immigration accrue n’est qu’une illusion, les pays du tiers-monde étant eux-mêmes bien plus avancés qu’on ne le croit dans le processus de dénatalité.
M. Marchal nous a autorisés à mettre sur notre site Internet les extraits qui suivent de ce livre dont nous recommandons l’achat.
Editions L’Harmattan, Mars 2003. 10,70 €.
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3. La démocratie déséquilibrée
Pendant la longue et difficile construction de la démocratie et la délicate recherche d’un équilibre juste et fragile entre des forces diverses voire contradictoires, un déséquilibre inaperçu a pris racine et a grandi...
3.1 La pyramide des âges, principal outil des démographes.
Le principe de la pyramide des âges est simple. Considérons une population bien déterminée à un instant donné, par exemple la population de la France métropolitaine le premier janvier 1951 (figure 3).
L’axe vertical est gradué en âge de zéro jusqu’à 100 ans.
Les 42 millions d’individus de la population considérée sont répartis par tranches d’âge, les femmes à droite et les hommes à gauche. Les graduations de l’axe horizontal donnent soit l’effectif (cas de la figure 3), soit le pourcentage sur la population totale.
Ainsi, le premier janvier 1951, il y avait en France 310 000 femmes et autant d’hommes nés en 1910 et donc alors âgés de 40 ans.
Les pyramides des âges se ressentent beaucoup de l’histoire de la nation étudiée. Ainsi la dissymétrie hommes-femmes des 55-70 ans est en partie due aux pertes militaires de la première guerre mondiale, laquelle entraîna aussi un déficit très important des naissances : les deux brèches symétriques des 32-36 ans.
Les figures 1 à 5 montrent l’évolution de cette pyramide au cours du vingtième siècle, depuis la pyramide très régulière du premier janvier 1901 jusqu’à celle du premier janvier 1991 à travers toutes les vicissitudes du siècle : les deux guerres mondiales, la crise des années 30, les « trente glorieuses » économiques et démographiques d’après-guerre puis à nouveau la crise et le chômage...
D’une pyramide à la suivante les diverses indentations apparaissent à la base puis montent régulièrement et s’effacent peu à peu.
3.2 Trois pyramides caractéristiques.
Comparons les trois pyramides des figures 1 , 4 et 6 : la France métropolitaine d’une part en 1901 (avec l’Alsace et la Lorraine) et d’autre part en 1971, puis l’Union Européenne à 15 le premier janvier 1999. Que de différences !
Certes il y une différence de nombre total : pour la France 39 millions en 1901 (40 millions avec l’Alsace et la Lorraine) et 51 millions en 1971, contre 376 millions pour l’Union européenne de 1999. Mais ce n’est pas là le plus important. C’est sur la composition par âge qu’il nous faut concentrer l’attention.
En 1901 la France est à la fois le pays où la proportion des personnes âgées est la plus grande et, avec l’Angleterre, celui où l’espérance de vie est la plus élevée ( 48 ans) et pourtant comme cette pyramide parait pleine de jeunesse comparée à la celle de la figure 6... On peut au passage mesurer là le chemin parcouru puisqu’un siècle plus tard la moyenne mondiale de l’espérance de vie atteint 67 ans. Peut-on vivre la même vie quand on ne vit que 48 ans, voire 35 ou 40 ans dans de nombreux pays d’alors, et quand on vit 67 ans ou même bien davantage ?
Une autre manière, peut-être plus parlante, de comprendre ce progrès : Dans les conditions de vie de la France de 1900 un enfant sur quatre mourait avant l’âge de 18ans ; aujourd’hui il faut attendre l’âge de 72 ans pour arriver à cette même proportion de disparus...
En 1971 (figure 4), la pyramide française présente des brèches énormes, reflets des deux guerres mondiales, pas tant d’ailleurs les pertes militaires (déjà dans le haut de la pyramide) que le déficit des naissances dû aux séparations et aux conditions économiques difficiles des temps de guerre. Dans le bas de la pyramide, le baby-boom continue de bien se porter ; il dure en France quelques années de plus que dans le reste de l’Europe et la rajeunit considérablement par un processus inverse du vieillissement actuel.
En 1999 (figure 6), la situation est retournée. Le baby-boom d’après-guerre est déjà un évènement du passé et depuis 1965 le nombre annuel de naissances n’a cessé de reculer ; il n’est même plus les deux tiers de ce qu’il était alors. D’où cette forme « en as de carreau en train d’émerger » qui, si elle continue, nous promet un vieillissement impressionnant prélude à un effondrement inéluctable.
Un seul chiffre pour mesurer le vieillissement : en Europe les jeunes femmes de 25 à 40 ans (zone 4 de droite, en hachures) , mettent au monde près de neuf dixièmes des enfants. Elles étaient 43 millions en 1999. Un quart de siècle plus tard, en 2024, elles seront remplacées par celles de 0 à 15 ans qui ne sont que 30 millions. Si donc on ne donne pas aux jeunes couples qui vont venir les moyens d’avoir plus d’enfants que leurs parents (mais pas nécessairement autant que leurs grands parents), l’Europe sera en 2030 un asile de vieillards que les rares jeunes, écrasés par les impôts et les charges, fuiront pour des pays plus accueillants ...
Bien entendu il ne manque pas d’experts pour déclarer : « Tout ceci n’est pas grave, si nécessaire nous ferons venir des jeunes immigrants... ». Mais de tels propos sont odieux aux oreilles des Africains qui ne viennent pas par plaisir affronter les difficultés, les souffrances et les épreuves de tout exil. Ils ne leur rappellent que trop l’esclavagisme et le colonialisme d’autrefois : « Si le travail est trop dur dans nos plantations des Amériques nous ferons venir de vigoureux Africains... »
Ajoutons que ce n’est pas réaliste car ce que connaît l’Europe maintenant, les autres nations vont le connaître prochainement : il suffit de regarder les pyramides des âges du Brésil (figure 7) ou de l’Iran (figure 8) ou de presque toutes les nations d’aujourd’hui. Elles aussi se creusent déraisonnablement à la base, mais avec un temps de retard sur nous qui leur laisse tout de même un plus grand délai pour réagir. En tout cas, compter sur les immigrants pour redresser notre situation, c’est une fois de plus soigner l’Europe sur le dos des autres : les autres nations ont besoin de leur jeunes et nous devons faire notre travail nous-mêmes.
Certes on peut objecter qu’il y a quelques nations qui n’ont pas encore atteint leur maximum, mais ce sont de petites nations dont la situation est tout à fait particulière, des nations en guerre ouverte ou larvée (Tchétchénie, Kosovo, Yémen) ou luttant durement pour leur survie (Israël, Palestine). Une forte fécondité est alors l’un des moyens de défense.
Pour le reste du monde, c’est l’allongement de l’espérance de vie qui est actuellement le facteur essentiel de l’augmentation de la population, ainsi un gain de neuf années en Inde pour la période 1980-2000. Partout le nombre des personnes âgées augmente avec rapidité tandis que, presque partout, la natalité et le nombre des jeunes diminuent, souvent très vite (voir l’annexe 2 : Le coup de frein démographique mondial et l’effondrement de l’Europe).
Cet allongement de l’espérance de vie ne suffit même plus en Europe : 16 nations européennes ont plus de décès que de naissances. La Russie et l’Ukraine n’ont que deux naissances pour trois décès.
Comment les démographes expliquent-ils ce renversement de situation que l’on a pu intituler « Démographie : de l’explosion à l’effondrement ». Les démographes officiels de l’ONU ne l’expliquent pas et s’accrochent à la théorie de la « transition démographique » complètement dépassée par les évènements : elle prévoit une tranquille évolution finale vers un équilibre stable entre natalité et mortalité, tandis que des pays comme la Grèce, l’Italie ou l’Espagne, où le taux de remplacement d’une génération par la suivante est déjà inférieur à 75%, voient ce taux baisser encore !
Cet aveuglement a une explication, il est dû à une de intervention de la politique dans la science ; le genre d’intervention qui a souvent des conséquences catastrophiques... Voir ci-après, en annexe 1, le chapitre «De la théorie géocentrique à la transition démographique : comment meurt une théorie scientifique ».
Bien entendu on peut s’étonner de voir la pyramide française de 1990 (figure 5) nettement différente de la pyramide européenne de 1999 (figure 6), le creux d’en bas y est visiblement plus faible. La raison en est que la plupart de nos partenaires sont dans une situation pire que la nôtre, ainsi les figures 9 à 13 relatives aux cinq grands pays de l’Union en 1999 montrent que, seule de nos voisins, la pyramide de la Grande-Bretagne n’a pas un étranglement trop prononcé à la base. L’Italie et l’Espagne décrochent bien davantage que la moyenne de l’Union Européenne (indiquée par le tracé en noir identique sur les cinq figures). L’Allemagne fait un peu mieux, mais décroche depuis plus longtemps et aura de ce fait encore plus de mal à remonter la pente...
Bien entendu, on peut avoir une réaction égoïste : « sauvons la France, que les autres se débrouillent ». Mais croire cela est tout à fait utopique. Nos pays sont inextricablement liés, d’autant plus qu’ils ont désormais une monnaie commune. Si nous laissons l’un des pays couler, les autres participeront à la facture par divers moyens dont sans doute une inflation générale.
Ce qui nous menace en grand n’est rien d’autre que ce qui est arrivé en petit aux départements de la Creuse ou des Basses-Alpes (aujourd’hui Alpes de Haute Provence). Confrontés à un vieillissement massif, et aux charges correspondantes, les jeunes ont fui et des cantons entiers sont morts dans la misère.
Notre document essentiel de travail est donc la pyramide de la figure 6, celle de l’Union Européenne dans son ensemble. Elle indique clairement que continuer sans rien changer nous conduit droit au vieillissement puis à l’effondrement. Mais elle indique aussi le déséquilibre actuel : qui peut redresser la situation ? : les jeunes couples, mais qui sont les plus nombreux ? : les citoyens qui ont dépassé l’âge de fonder une famille. En France un bulletin de vote sur deux est aujourd’hui issu d’un citoyen, ou d’une citoyenne, de plus de 49 ans et le vote des plus de quarante ans dépasse 65%.
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2. De la démographie
La démographie est une science humaine, elle ne saurait donc prétendre à la précision de l’Astronomie.
Pendant des siècles les idées les plus étranges ont eu cours et même au siècle des lumières de nombreux penseurs imaginaient la Terre plus peuplée dans l’Antiquité qu’à leur époque.
La démographie scientifique naît avec la généralisation de l’état civil et des recensements périodiques ; pour la France au début du 19e siècle. Mais déjà Richard Cantillon avait fait des observations remarquables liant démographie et économie (Réf. 4). Il nota en particulier que le comportement fécond des jeunes couples est très influencé par leur position dans la société et si à son époque les pressions sociales sont encore très fortes, la nécessité personnelle de « tenir son rang » pousse à limiter les naissances quand elles entraînent un trop fort déclassement.
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3. De la transition démographique
La théorie de la transition démographique a été mise au point par Frank W. Notestein et la fondation Rockefeller au cours des années 1930 et 1940 (Réf. 5-11), elle a servi de modèle aux services démographiques américains à partir de 1950 et a pratiquement été imposée comme référence de base au reste du monde dès les années 50 en dépit des travaux contraires d’Adolphe Landry et d’Alfred Sauvy (Réf. 12-32 et voir en annexe 4 la note en bas de page concernant ces deux démographes et Richard Cantillon).
Les éléments essentiels de la théorie de la transition démographique sont bien connus et correspondent bien, grosso modo, à l’évolution passée. C’est l’évolution future qui fait problème, mais n’anticipons pas.
Dans les siècles passés la natalité et la mortalité étaient voisines et toutes deux élevées, tandis que l’espérance de vie était faible, 25 à 35 ans. La population était plus ou moins stable mais avec des hauts et des bas importants selon les événements historiques et biologiques (guerres, famines, épidémies... ).
La révolution industrielle augmente prodigieusement les ressources de la population, tandis que les progrès de la médecine et de l’hygiène réduisent remarquablement la mortalité (phase B, fig. 18) puis la natalité baisse à son tour plus ou moins rapidement (phase C), enfin la théorie prévoit, mais c’est là que le bât blesse, que l’équilibre natalité-mortalité se rétablit naturellement à un niveau beaucoup plus bas qu’autrefois, avec donc une espérance de vie élevée.
Pendant la période BC intermédiaire, la période de ‘’transition démographique’’, la différence natalité-mortalité entraîne un accroissement plus ou moins important de la population. Cet accroissement est relativement faible en France où la baisse de la démographique : natalité suit de peu celle de la mortalité, il est beaucoup plus important en Angleterre qui maintient un siècle de plus une natalité élevée et ne commence sa phase C que vers 1900.
A) Equilibre chaotique initial. Baisse de la mortalité (B) puis de la natalité (C) et enfin équilibre théorique final (D). . |
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Fig. 18. Schéma théorique de la transition |
Il suffit de comparer les situations de départ : la France napoléonienne avait environ 30 millions d’habitants, l’Angleterre de cette époque n’en avait que 10 millions, elle a pourtant envoyé outre-mer bien plus d’émigrants que la France et se retrouve avec une population actuelle presque égale.
Aujourd’hui, à l’exception de quelques rares pays d’Afrique Noire et de certains pays en état de grave affrontement politique comme la Palestine, les diverses nations sont entrées dans la transition démographique. Il y a bien sûr de grandes différences d’une nation à l’autre, l’état des nations les plus en retard (Pakistan, Moyen-Orient, Afrique) est peu comparable avec celui des nations d’Europe aux populations vieillies, mais la rapidité de l’évolution générale surprend (annexe 2) et les prévisions des Nations-Unies sont très souvent corrigées à la baisse.
Phénomène essentiel l’ « équilibre final » n’est pas en vue, bien au contraire le nombre des nations qui n’assurent plus le renouvellement de leurs générations ne cesse d’augmenter, il dépasse déjà 50. Les taux de renouvellement continuent de baisser même là où ils sont inférieurs à 80% et ces taux ne sont même pas 60% pour l’Italie du Nord, le Pays Basque, la Catalogne et l’ex-Allemagne de l’Est... Seule l’augmentation de l’espérance de vie masque encore temporairement la situation en dissimulant la diminution du nombre des jeunes par une grande augmentation du nombre des personnes âgées mais malgré cela désormais 16 nations, pour la plupart européennes, voient le nombre des décès l’emporter sur celui des naissances. La Russie et l’Ukraine comptent trois décès pour deux naissances...
Certes il y a eu quelques sursauts, comme celui de la Suède des années 1989-95, où une politique vigoureuse d’aide à la maternité et à l’amélioration de la condition féminine face aux contraintes de la vie professionnelle a fait remonter l’indice synthétique de fécondité à 2 enfants par femme. Mais cette politique ayant été grandement édulcorée, à cause de son prix, l’indice est retombé à 1,6...
4. Le régime démographique contemporain
S’appuyant sur les idées de Richard Cantillon (Réf. 4), Adolphe Landry et Alfred Sauvy (Réf. 12-32) ont développé la théorie du régime démographique contemporain ; théorie aujourd’hui complétée par les travaux des démographes Jean Bourgeois-Pichat, Jean-Claude Chesnais, Philippe Bourcier de Carbon et Jacques Dupâquier (Réf. 33- 42).
Le régime démographique contemporain est le troisième stade d’une longue évolution commençant avec le régime primitif où il n’y a aucune restriction volontaire à la fécondité, puis le régime intermédiaire où la fécondité est contrôlée par l’intermédiaire de la nuptialité. Ce second stade fut celui de la France et de l’Angleterre au 18e siècle et dans ce régime la pression des besoins entraîne aussi bien chez les individus que dans les normes sociales des restrictions de la nuptialité qui ont pour effet de maintenir pour les individus, pour les familles, un certain degré de bien-être que l’on entend conserver... Le niveau de la population
s’établira à une certaine distance du maximum, plus ou moins bas selon que les exigences en fait de bien-être seront plus ou moins grandes (Réf. 27, page 541).
Dans le troisième stade, donc celui du régime démographique contemporain, une caractéristique essentielle est une pratique très répandue de la contraception voire de l’avortement. Mais ce ne sont là que des moyens, l’essentiel est un changement profond de mentalité : une aspiration générale non plus à un simple maintien mais à une amélioration de sa condition et de celle de ses enfants (Réf. 22, page 52), c’est une conséquence logique de l’idée de progrès et de la rationalisation croissante de la conduite.
Le résultat capital est qu’il n’y a plus d’équilibre de la population... l’accroissement de la population ne découle plus nécessairement du progrès technique, on pourra même voir la population décroître malgré ces progrès... Il n’y a aucun fondement pour certaines idées auxquelles des auteurs se sont attachés ou qui ont large cours : l’idée d’un état stationnaire où la population se fixerait un jour... Le régime nouveau se définit comme un régime non d’équilibre mais de mouvement (Réf 22, pages 53-55). La fécondité est déliée de ses déterminants sociaux traditionnels et se lie toujours plus étroitement aux utilités individuelles.
Ce régime démographique contemporain s’instaure progressivement en France après la Révolution, puis gagne après 1870 les pays de l’Europe occidentale et septentrionale. Il s’étend désormais dans le monde entier et l’on voit de nombreux pays passer en moins d’une génération directement du régime primitif à ce régime démographique contemporain (voir annexe 2 : Le coup de frein démographique mondial et l’effondrement de l’Europe).
Une question fondamentale est la détermination des éléments qui influent désormais le plus sur la fécondité. On pense évidemment aux politiques familiales : faire en sorte que dans une profession donnée les couples ayant des enfants aient, compte tenu de ces enfants, à peu près le même niveau de vie que les célibataires et les couples sans enfant, ceci afin que les jeunes couples puissent choisir d’avoir des enfants sans en être trop pénalisés. Contrairement à certaines idées reçues ces politiques ont une efficacité importante (voir annexe 3 : De l’efficacité des politiques familiales ). Mais il y a aussi un autre élément essentiel mis à jour par Philippe Bourcier de Carbon et tout à fait en accord avec les idées de Richard Cantillon : l’importance du revenu des jeunes en proportion de celui de leurs aînés (voir en annexe 4 : Revenu relatif et fécondité), c’est là qu’intervient le fameux « tenir son rang » de Cantillon.
Il ressort de cette étude que l’ICF, indice conjoncturel (ou synthétique) de fécondité, c’est à dire le nombre moyen d’enfants par femme, possède une très forte corrélation avec le rapport r du salaire moyen des moins de quarante ans à celui des plus de quarante ans (chômeurs compris dans les deux cas). Les statistiques américaines tiennent compte des classes d’âge et permettent ces comparaisons.
La figure 18 de l’annexe 4 est particulièrement parlante à ce sujet : avec un temps de réponse de l’ordre de deux à trois ans les deux courbes r(t) et ICF(t) subissent les mêmes variations, dans les deux sens (crise, baby-boom, baby-krach, légère reprise).
On notera que l’échelle n’est pas la même pour le rapport r, à gauche, et l’ICF, à droite, ce dernier paramètre varie beaucoup plus et le phénomène est d’une grande sensibilité.
On peut grossièrement résumer cette situation par ce qui suit : A deux ou trois ans près et en l’absence de toute politique familiale, les États-Unis ont connu depuis 1929 (date du début des statistiques à ce sujet) la liaison suivante entre le ‘’nombre moyen d’enfants par femme’’ appelé ICF, et le rapport r du salaire moyen des moins de 40 ans à celui des plus de quarante ans :
Dans cette période le rapport r a varié entre 0,72 et 0,94 et l’ICF entre 1,75 et 3,77 (maximum de 1957).
Ce résultat essentiel est corroboré par l’étude de Jacques Bichot pour la Sarre, l’Allemagne de l’Est et Israël (annexe 3) et celle de Bernard Legris pour la France (annexe 5) où une forte détérioration de la condition des jeunes, d’abord relative puis même absolue, accompagne en trente ans la chute de l’ICF de 2,7 à 1,7 enfants par femme.
Notons au passage la faible incidence du régime politique sur la fécondité, au contraire de la politique familiale. La comparaison des deux Allemagnes (annexe 3) montre une évolution démographique tout à fait similaire jusqu’en 1976, avec des courbes de fécondité décroissantes très voisines et se croisant plusieurs fois. Mais, alarmé, le gouvernement Est-Allemand prend à cette date des mesures importantes : prêts et dons pour le logement des familles avec plusieurs enfants, ouvertures de crèches dans toutes les villes, année de congé rémunéré après les naissances de rang deux et plus, etc.
En quelques années le redressement est spectaculaire : 182 000 naissances en 1975, 240 000 en 1982, redressement confirmé jusqu’à l’ouverture du mur de Berlin.
Après 1989 la législation Ouest-allemande s’étend à toute l’Allemagne, la plupart des crèches sont fermées faute de crédits, les années de congé et les prêts sont supprimés, la fécondité Est-allemande baisse de moitié en quelques années...
Il est bien entendu souhaitable d’étendre et de vérifier toutes ces études. Ainsi aux USA l’inclusion des revenus d’activités indépendantes donne pratiquement la même courbe r(t) et l’inclusion des revenus totaux (héritages, revenus du capital etc.) entraîne des décalages de l’ordre de six mois. Il faut aussi bien sûr étendre l’analyse à d’autres pays, celle du Canada est en cours.
5. Discussion.
Le seul reproche sérieux que l’on puisse faire à la théorie de la transition démographique est la notion d’équilibre final spontané, mais ce reproche est grave ; cette notion pervertit toutes les analyses comme en témoignent les figures 19 et 20 ci-dessous.
Fig. 19. Prévisions de l’ONU. La fécondité italienne, versions 1992 et 1998 (Réf. 43).
. Fig.20. Prévisions de l’ONU. La fécondité allemande, versions 1992 et 1998 (Réf. 43).
Dans ces deux figures les prévisions de 1992 s’arrêtent en 2025 et celles de 1998 continuent jusqu’en 2050. Dans chaque cas on présente une version haute, une version moyenne et une version basse, ce qui est une procédure classique de prospective.
Le passé est déjà bien connu jusqu’à quelques années avant la date de la publication, il présente donc une courbe unique, descendante depuis les années soixante, la même pour les versions 1992 et 98.
Ce qui est étonnant c’est ce qui se passe après : on voit les versions hautes et moyennes remonter : ne faut-il pas revenir vers le niveau ICF = 2,1 de l’équilibre final spontané prévu?
Là où la contradiction devient flagrante c’est lorsque l’on compare les versions 92 et 98, surtout pour l’Allemagne : la réalité de la période 1992-98 est plus basse que la version basse de 1992, cependant, malgré ce démentit cinglant, les prospectivistes n’en continuent pas moins à pronostiquer une remontée prochaine des indices, toujours en vertu de la théorie de l’équilibre final spontané ! N’oubliez pas que des décisions très lourdes, comme la politique familiale ou l’âge et le niveau des retraites ainsi que les prélèvements correspondants sont basées sur ces prévisions fausses !
Cette situation est tout à fait typique d’une théorie scientifique dépassée mais qui continue à être utilisée sans discernement. Cependant il est juste de remarquer que dans les premières versions de son travail Notestein ne parlait nullement d’un équilibre final spontané, il avait classé les populations post-transitionnelles dans la catégorie incipient decline (déclin commençant).
Que s’est-il donc passé ? Il s’est passé qu’effrayés par l’explosion démographique des années 50 et 60 certains responsables ont voulu a tout prix convaincre les dirigeants du monde, et en particulier ceux du tiers-monde, de l’urgence d’appliquer des programmes de birth control. C’était le temps où le Président Johnson répétait : « 5 dollars investis dans le contrôle de la population valent 100 dollars investis dans la croissance économique ». Mais pouvait-on convaincre avec une théorie qui conduisait à l’incipient decline? Il fallait rassurer, de là à travestir la vérité il n’y avait qu’un pas, un pas qui est un péché capital en matière scientifique car la vérité est têtue, elle se venge toujours... Certes il est bien difficile de porter un jugement valable sur ce qui s ’est passé et c’est vrai qu’il y avait urgence, cependant il serait suicidaire de continuer à fermer les yeux et à croire encore à l’équilibre démographique futur spontané promis par la deuxième version de la théorie de la transition démographique.
6. Conclusion
Nous voici donc au pied du mur. Il suffit de regarder la pyramide des âges de l’Union Européenne ( Fig. 6 et 23 ) pour comprendre qu’à continuer ainsi l’Europe sera dans trente ou quarante ans un asile de vieillards que les rares jeunes, écrasés par les charges et les impôts, fuiront pour des pays plus accueillants. Situation typiquement instable, prélude à un effondrement massif.
Bien sûr l’Europe n’est pas seule dans cette situation. Bien des pays autrefois considérés comme prolifiques, la Chine, l’Iran, le Brésil etc. présentent les mêmes symptômes, le même rétrécissement à la base de la pyramide, un rétrécissement parfois encore plus prononcé que celui de l’Union Européenne ; mais avec toutefois une différence essentielle : ils sont en retard de dix à vingt ans sur l’Europe et ont donc plus de temps pour réagir.
Certains Européens pourraient être tentés de remédier à la situation par des immigrations massives, mais le problème étant mondial ce serait une fois de plus se décharger de notre travail sur le dos des autres comme au temps de l’esclavage. Les autres nations ont besoin de leurs jeunes, les immigrés préfèreraient de loin vivre dans leur pays et nous devons faire notre travail nous-mêmes.
Le vrai problème est psychologique, les promoteurs de la théorie de la transition démographique, et tous les décideurs qui les ont suivis, vont-ils admettre qu’il leur faut radicalement changer de route ? Certes l’équilibre démographique de chaque nation est très souhaitable, c’est sans doute même l’une des conditions nécessaires de la paix, mais il n’est pas donné et seules des politiques démographiques appropriées, à la fois volontaristes et raisonnables pourront l’atteindre.
Ce changement se fera t-il facilement ou difficilement ? Le second cas est malheureusement le plus probable car tout ce qui touche de près à la condition humaine soulève les passions. Il faudra alors ajouter une quatrième similitude aux trois déjà relevées dans l’introduction entre la théorie géocentrique et la transition démographique.
Les rides de la France …
Par le Recteur Gérard-François Dumont
Professeur à la Sorbonne
Les informations périodiquement parues dans la presse laissent souvent l’impression que l’évolution démographique de la France serait extrêmement favorable. Or, même s’il est vrai qu’elle est moins inquiétante que celle de nos principaux partenaires européens, comme l’Allemagne, l’Espagne ou l’Italie, il n’y a pas lieu de chanter « tout va très bien, Madame la Marquise ».
En effet, la France continue de prendre des rides tant au regard de l’évolution de sa population que de celui de ses territoires.
Le vieillissement s’accentue
Sur le plan démographique, et malgré l’augmentation des naissances des années 2000 et 2001(1), présentée à tort comme un « baby-boom », la France ne remplace pas ses générations. Le nombre des naissances enregistrées en 2001, soit 774 800 naissances(2), correspond à un taux de natalité de 13,1 naissances pour mille habitants, en baisse de 0,1 point par rapport à 2000, à un des niveaux les plus bas depuis la seconde guerre mondiale.
L'indice synthétique de fécondité, à 1,90 enfant par femme (contre 1,88 en 2000), est, pour la vingt-huitième année consécutive (1), inférieur au niveau nécessaire au simple remplacement des générations (2,08 enfants par femme). Il aurait fallu en effet 860 000 naissances en 2001 (85 000 de plus) pour assurer ce simple remplacement. Le déficit cumulé des naissances sur un quart de siècle dépasse 3,3 millions d'enfants non nés. Ce chiffre met en évidence un des aspects de la situation économique de la France, dont la consommation et l’incitation à investir ont été directement touchées par la dénatalité, même si beaucoup d’entreprises ont pu amortir le freinage du marché intérieur par des politiques actives à l’exportation.
En fait, la population de la France continue son vieillissement : la proportion des moins de 20 ans continue à diminuer (25,3 % au 1er janvier 2002) et n'a jamais été aussi faible.
Concernant la mortalité, sa légère diminution en 2001 accentue les progrès de la longévité. Le nombre des décès est, toujours en données provisoires, de 528 000 en 2001 (contre 536 300 en 2000), une baisse qui s’explique entièrement par une progression de l’espérance de vie. En effet, à taux de survie par âge inchangés, le nombre des décès aurait dû augmenter. Le gain d’espérance de vie à la naissance est donc de trois mois et demi en 2001.
La population continue de croître, ce qui n’est pas une mauvaise nouvelle, mais cette croissance s’effectue essentiellement par effet d’inertie en ce qui concerne le mouvement naturel et par excédent de l’immigration sur l’émigration en ce qui concerne le mouvement migratoire, l’excédent des naissances sur les décès est estimé à 246 900 en 2001, et le solde migratoire évalué à 60 000. En conséquence, la population de la France métropolitaine est estimée, au 1er janvier 2002, à 59,344 millions d'habitants, après "ajustement" de 480 545 à la baisse suivant les résultats du 33ème recensement de mars 1999(1).
Après la chute du nombre des mariages, de 40 % en vingt ans, la France avait connu une légère hausse en 1996-1997, suite à l’amendement de Courson qui supprimait les avantages fiscaux aux enfants hors mariage. En 2001, on compte 303 500 mariages contre 305 000 en 2000, deux chiffres encore provisoires.
Rappelons que le chiffre provisoire de 1998, donné début février 1999, 282 100, a laissé la place en décembre 2000 à un chiffre définitif de 271 361, soit un écart considérable, supérieur à 10 000. Il convient de rappeler que la France a, hormis la Suède, le plus faible indice synthétique de primonuptialité féminine de l’Europe des Quinze(1).
Même s’il est heureux de constater d’homéopathiques tendances positives plutôt que le contraire, les fondamentaux démographiques de la France, exposés dans notre livre La population de la France, des régions et des DOM-TOM (Éditions Ellipses), restent sans changement. Ils doivent être examinés avec lucidité si l’on veut mettre en œuvre des politiques répondant aux besoins de l’avenir.
Les fractures territoriales
Le vieillissement moyen de la population résulte en fait d’un vieillissement nettement plus accentué sur certains territoires et même d’une dépopulation dans le quart des départements.
En fait, après correction des inexactitudes du recensement, la proportion de la population de la France vivant en région Île-de-France a augmenté davantage que le taux moyen national.
Dans treize départements, on compte moins de 75 jeunes de moins de vingt ans pour cent personnes âgées de 60 ans ou plus. La Creuse, avec seulement 53 jeunes pour cent personnes âgées, compte plus du tiers de 60 ans ou plus, 34,36 % exactement contre seulement 18,27 % de moins de vingt ans (1). Entre les deux derniers recensements, 23 départements perdent des habitants. Le caractère géographiquement différencié des évolutions démographiques et surtout des compositions par âge est le phénomène le plus nouveau des évolutions en cours comme si le mythe « tout le monde en ville et des réserves d’indiens dans les espaces interstitiels » se concrétisait, quitte à créer de véritables ruptures territoriales qui sont un aspect de la difficulté de la concorde civique.
Ainsi l’avenir de la France appelle une double politique, accueillante aux familles et facilitant une meilleure cohésion territoriale, par une politique ambitieuse d’aménagement du territoire
(1) Cette hausse pourrait d’ailleurs correspondre à un effet « millenium » ou effet du dragon (Cf. Dumont, Gérard-François, « L’année du dragon », Population & avenir, novembre-décembre 2000
(2) Chiffre provisoire concernant la France métropolitaine
(3) Pour une mise en perspective de la population de la France, Cf. Dumont, Gérard-François, La population de la France, des régions et des DOM-TOM, Paris, Ellipses.
(4) Cf. Bulletin mensuel de statistiques, janvier 2001. Ce chiffre correspond aux « disparus du recensement », Cf. Population & avenir, n° 647, mars-avril 2000.
(5) Sur l’identité de l’Europe, notamment en matière démographique, Cf. Dumont Gérard-François et alii, Les racines de l’identité européenne, Economica, Paris 1999.
(6) « L’âge des départements », Population & avenir, n° 657, mars-avril 2002,
L’implosion de la population française, fruit de trente années de démantèlement progressif de la politique familiale
Contrairement aux idées fausses, désormais complaisamment colportées, les comportements féconds des jeunes adultes (âgés de moins de 40 ans), dont dépend le remplacement des générations, c'est-à-dire la pérennité des peuples, demeurent très sensibles aux conditions économiques et sociales qui leur sont faites, en comparaison de celles acquises par leurs aînés. Autrement dit, leurs unions comme leurs décisions de mettre au monde des enfants, répondent directement à la place que la société veut bien leur concéder.
Cette réalité était bien présente à l'esprit du Général de Gaulle, conseillé par Adolphe Landry et Alfred Sauvy, lors de sa célèbre adresse du 2 mars 1945 à l'Assemblée Consultative, au milieu des ruines et avant même la fin des combats : "De quelque façon que nous organisions notre travail national, nos rapports sociaux, notre régime politique, notre sécurité même, s'il est acquis que, décidément, le peuple français ne se multiplie plus, alors la France ne peut plus rien être qu'une grande lumière qui s'éteint. Mais, dans ce domaine encore, rien n'est perdu pour peu que nous sachions vouloir (...). Un grand plan est tracé qui va comporter des avantages attribués aux uns, des sacrifices imposés aux autres, pour qu'à tout prix soit obtenu le résultat vital et sacré". Présidant assidûment en personne, en compagnie de son Ministre des Finances, le Haut Comité de la Population et de la Famille, il impose alors, par ordonnances, les trois principes qui vont constituer les trois piliers de la politique familiale française, à l'origine du magnifique renouveau démographique du pays et des trente années de prospérité, que Fourastié baptisera plus tard les trente glorieuses :
1) Le principe de "Compensation des charges familiales", selon lequel, de droit, les allocations familiales sont indexées, non sur les prix, mais sur le salaire de base.
2) Le principe de la distinction de la politique familiale et de la politique égalitariste de "distribution des revenus", selon lequel, la politique familiale n'étant rien d'autre qu'un investissement de la nation dans sa jeunesse, les allocations familiales, qui ont le caractère de simple compensation d'investissements privés à intérêt collectif, doivent demeurer indemnes d'imposition sur le revenu. Au surplus, ayant aussi un caractère d'assurance, c'est-à-dire de retour sur cotisations, les allocations familiales ne doivent pas être non plus soumises à "conditions de ressources".
3) Le principe de la "capacité contributive(1) des familles" qui instaure le quotient familial dans le calcul de l'impôt sur le revenu des familles : non pas "à revenu égal, taux d'imposition égal", mais "à niveau de vie égal, taux d'imposition égal".
Depuis la fin des années 60 et le début des années 70, ces principes qui préservaient une place éminente pour les familles au sein de la Nation, seront, tous progressivement vidés de leur contenu, voire ouvertement abolis, par les gouvernements successifs, dans leur souci de gérer, à court terme, leurs difficultés budgétaires et leurs échéances politiques et électoralistes, au point qu'il ne reste plus aujourd'hui en réalité pierre sur pierre de ce dispositif salvateur. Nous ne pouvons pas ici rappeler les étapes de ce démantèlement systématique(2), mais pour indiquer l'ampleur de cette dérive silencieuse, qu'il nous suffise de nous souvenir que, jusqu'à la fin des années 60, l'enveloppe des allocations familiales représentait près de 3 % du PIB, quand les 70 milliards de France, qui leur sont encore alloués aujourd'hui, n'en représentent même plus 0,8 % (leur pouvoir d'achat ayant même cessé d'être maintenu depuis 1995), bien qu'elles concernent pourtant les quelque 10,3 millions d'enfants bénéficiaires des 4,2 millions de familles sur lesquelles repose de fait la pérennité physique de notre pays.
Depuis une trentaine d'années, la chute de la natalité, combinée avec la croissance de l'espérance de vie après 50 ans, induit une véritable inversion de la pyramide des âges de nos sociétés européennes, au sein desquelles cohabitent désormais quatre, et demain peut-être cinq, générations. Ce phénomène se traduit par la croissance accélérée du poids des seniors dans tous les aspects de la vie de la Nation, au détriment de la place des jeunes adultes, entraînant pour ces derniers une triple éviction progressive : une éviction politique, une éviction sociale, et une éviction économique, en terme de patrimoine, en terme de revenus, comme en terme de pouvoir d'achat. L'INSEE et le CREDOC mesurent ainsi aujourd'hui des différences de l'ordre de 30 % entre les niveaux de vie moyens des jeunes adultes et ceux des seniors.
Or, les processus de décision collective, qui définissent les priorités réelles de la Nation, et qui, dans nos démocraties, procèdent des bulletins de vote, sont affectés par le vieillissement progressif des collèges électoraux, où les seniors, ayant dépassé les âges de fécondité, sont désormais devenus majoritaires au fond des urnes(3). C'est ainsi que, d'ores et déjà, l'âge médian des votants a dépassé 50 ans en France (52 ans en Allemagne), et que cet âge s'accroît, mécaniquement en raison de la chute des effectifs des nouvelles générations majeures, d'un an tous les trois ou quatre ans. On comprend pourquoi l'urgence, chaque année plus pressante, de la restauration d'une grande politique familiale pour enrayer la dénatalité, ne peut que trouver chaque année moins d'écho dans les mondes politiques et médiatiques qui scellent aujourd'hui notre destin collectif.
Sans doute, tant qu'il en est temps encore, faudrait-il instituer des comptabilités publiques des revenus et niveaux de vie selon les tranches d'âge(4), permettant de suivre annuellement l'évolution des revenus et niveaux de vie, absolus et RELATIFS des jeunes et des familles, "les transferts nécessaires vers une politique familiale explicitement conçue comme une compensation à la paupérisation relative des jeunes et des familles, devant être révisés si une évolution en sens contraire se produisait". De tels transferts pourraient jouer sur l'évolution démographique un rôle analogue à celui que les politiques contracycliques ont joué sur les économies après la crise de 29.
Sans doute aussi faudra-t-il parvenir à faire modifier les lois constitutionnelles pour imposer le principe, réellement démocratique(5), que tout citoyen mineur se voit reconnaître par la Constitution une voix confiée à son tuteur légal(6) lors des scrutins officiels. Mais qui pourrait aujourd'hui imposer ces indispensables réformes ? Le maintien d'un avantage particulier, l'emportant toujours avec certitude sur la poursuite du bien public, dès lors que cet avantage concerne directement et très majoritairement ceux à qui revient précisément la décision, comment les corps électoraux des démocraties vieillissantes, désormais dominés par des seniors, pourraient-ils aujourd'hui prendre une telle décision, ni même accepter simplement d'en débattre ?
Mais, à présent qu'en France, ou dans l'Union, le centre de gravité de la vie politique, économique et sociale a déjà franchi la barre des personnes de 50 ans, à présent que les seniors deviennent majoritaires au fond des urnes, que l'âge médian des héritiers a dépassé 50 ans, que, selon les travaux du CREDOC, "les plus de 50 ans détiennent plus de la moitié du patrimoine net des ménages", "qu'ils perçoivent déjà plus de 43 % du revenu des ménages avant impôts", et "en percevront plus de la moitié dès 2005", peut-être est-il déjà trop tard pour pouvoir rétablir le remplacement des générations et contenir les effets cumulatifs de l'inversion des pyramides des âges ?
Philippe Bourcier de Carbon
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Principe inscrit dans la liste des Droits de l'Homme depuis 1789.
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Le lecteur intéressé pourra se référer à notre article : "Politique familiale : 30 ans de démantèlement progressif". Liberté Politique. Printemps 2000, n° 12, Paris, Ed. F-X de Guibert, 2000, pp. 109-124.
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Cf. notre article : "Le vieillissement de la démocratie : le vieillissement du corps électoral entraîne l'éviction politique progressive des jeunes adultes et des femmes en âge de maternité". Liberté Politique, Hiver 1999-2000, n° 11, Paris, Ed. F-X de Guibert, 2000, pp. 9-33.
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En tenant compte des charges fixes des remboursements souscrits, comme des loyers fictifs des propriétaires de leur logement.
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Il a fallu attendre 1920 aux Etats-Unis, 1945 en France, pour que le droit de vote soit enfin reconnu aux femmes. Aujourd'hui seuls les mineurs se voient toujours refuser l'exercice de ce droit, ce qui fait que leurs intérêts élémentaires sont de moins en moins représentés dans les instances politiques.
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Lequel est pourtant tenu, et cela paraît bien naturel à tous, de représenter devant les tribunaux le mineur à sa charge dont il est le tuteur légal.
Cet article de M. Philippe Bourcier de Carbon, démographe, a été publié dans le numéro 207 de « Résistance nouvelle », bulletin de presse dirigé par M. Raymond Triboulet, ancien ministre, membre de l'Institut.
Cet article nous a paru particulièrement intéressant par le rappel qu’il fait des principes qui ont permis le redressement démographique de la France et par l’analyse du processus qui a conduit au démantèlement de la politique familiale qui avait été mise en place.
Famille et Liberté ne partage pas pour autant son pessimisme sur l’opposition qu’il voit entre « la croissance accélérée du poids des seniors » et « la place des jeunes adultes dans la société ».
Les seniors qui soutiennent notre action ont tout autant le souci du bien-être et du bonheur de leurs enfants et de leurs petits-enfants que du leur. Même s’ils n’ont pas de postérité, ils savent que la prospérité d’un pays et sa sécurité, intérieure autant qu’extérieure, est fonction de sa capacité d’assurer le renouvellement de ses générations. Voilà pourquoi il ne faut pas désespérer.
Famille et Liberté - Lettre N° 25 - Juin 2001