Politique familiale et Europe

Publication : lundi 1 octobre 2012 15:54

Assemblée générale de Famille et Liberté, le 17 mars 2010
Conférence du docteur Anna Záborská

LA FAMILLE DANS LA POLITIQUE ET DANS LA LÉGISLATION  DE L'UNION EUROPÉENNE

Mme Záborská, député slovaque au Parlement européen de Strasbourg depuis sept ans, y a présidé la Commission des droits de la femme et de l’égalité des genres pendant toute la précédente législature. Elle préside actuellement l’Intergroupe Famille.
Famille et Liberté l’a invitée à intervenir à l’issue de son assemblée générale du 17 mars 2010 pour nous aider à prendre conscience du poids des institutions européennes dans la politique familiale de chaque pays membre et de la façon dont les simples citoyens peuvent influencer ses décisions.

On trouvera ici le texte de son intervention.

Monsieur le Président et cher Monsieur Vanneste,
Mesdames, Messieurs les administrateurs
Chers amis de la famille,

 

 

Permettez-moi tout d'abord de vous remercier de m'avoir invitée ce soir.

Permettez-moi également d'exprimer une pensée pleine d'admiration pour le président de votre association, le député Christian Vanneste.

Il semblerait que nous partageons quelques points de vue sur la responsabilité morale des élus.

Cette conscience nous coûte parfois chère, et parfois nous nous retrouvons devant les tribunaux, mais je vous admire et vous félicite pour cet engagement sans faille.

Vous m'avez demandé de traiter des questions qui touchent la famille dans le contexte institutionnel de l'Union européenne et notamment au Parlement européen.

Ma modeste expérience de 7 années passées comme député slovaque au Parlement européen de Strasbourg alimente ma réflexion.

Si vous en êtes d'accord, j'évoquerai d'abord l'environnement au Parlement européen.

Ensuite j'expliquerai quelques-unes des menaces politiques et législatives auxquelles la famille fondée sur le mariage entre un homme et une femme se voit exposée au niveau européen.

Enfin, je m'autoriserai quelques remarques pour vous inviter à être des citoyens actifs au profit de la défense de la famille en particulier et de l'éthique sociale universelle en général.

(I) L'environnement parlementaire

Je voudrais d'abord évoquer le climat de travail au sein d'une assemblée composée de 736 élus dans 27 Etats membres qui se regroupent dans 7 groupes politiques et travaillent dans 22 commissions parlementaires permanentes pour représenter ainsi 500 million de citoyens.

Chaque langue officielle d'un Etat membre est également une langue officielle de l'Union européenne.

Avec 23 langues officielles, 506 combinaisons linguistiques sont possibles, puisque chaque langue peut être traduite dans les 22 autres langues.

Au Parlement européen, la question du partage des valeurs communes représente avant tout une question pragmatique.

Au sein de la commission parlementaire des droits de la femme que j'ai présidée tout au long de mon premier mandat de 2004 à 2009, les 70 membres appartenaient à 5 groupes politiques et environ 15 délégations nationales différentes.

Nous nous accordions toujours le temps nécessaire pour échanger les informations et pour comprendre les positions de l'autre à partir de son contexte culturel et linguistique.

Trop souvent, les collègues masculins nous accusent de papoter et de perdre du temps précieux.

Mais nous n'avons pas plus de deux hommes à la commission des droits de la femme et de l'égalité des genres.

C'est fort dommage. L'égalité des chances entre les femmes et les hommes ne concerne pas seulement les femmes.

Cette politique concerne également les hommes. Une première approche pragmatique consiste alors à gagner la sympathie des collègues masculins pour en faire des ambassadeurs.

Lorsque je suis entrée au Parlement européen, j'ai été étonnée de l'insoutenable légèreté et de l'insouciance qui distingue l'Europe de l'Ouest.

Cette insouciance incarne les attitudes et les conceptions différentes des deux Europe.

Les interrogations de citoyens de la seconde Europe s'articulent autrement que celles de l'Europe occidentale.

Souvent, nous éprouvons plus de complicité entre collègues de l'Europe de l'Est appartenant pourtant à des groupes politiques opposés.

Par contre, le contact entre collègues marqués par deux expériences culturelles différentes de l'Est et de l'Ouest est parfois plus difficile, même s'ils appartiennent à un même groupe politique.

Tous mes collègues sont habités par la volonté de construire une nouvelle Europe qui n'a de sens que si dans cinquante ans, nos petits-enfants pourrons y vivre plus heureux que nous.

Pour vivre heureux, il faut savoir choisir. Pour savoir choisir en toute connaissance de cause, la femme et l'homme doivent connaître toutes les options.

Je ne choisis pas une voiture juste selon sa couleur - la puissance du moteur ou le prix m'intéresse également. C'est la même chose dans la conciliation entre la vie professionnelle et la vie familiale : Comment choisir la meilleure option si les détails ne sont pas connus ?

Ainsi, une autre valeur commune que nous partageons, c'est le droit à l'information correcte et exhaustive.

N'ayons pas peur des détails, même s'il y en a beaucoup, même s'il y a des détails qui fâchent!

Mieux vaut connaître tous les repères pour arrêter un choix. Parfois, les choix qu'une famille ou un couple doit prendre sont très importants.

Souvent, nombre de familles souffrent du fait d'avoir choisi sans avoir été informé correctement.

(II) La famille, me direz-vous, que vient-elle faire au cœur des institutions politiques européennes ?

Femme élue par les Slovaques pour les représenter au Parlement européen, je suis amenée à décider à chaque session plénière à Strasbourg de conditions politiques, économiques et sociales de la vie en société.

Chaque décision des institutions européennes produit des résultats directs sur la vie de nos familles, souvent même sans que leur volonté soit entendue et respectée.

Pour ce soir, je voudrais mentionner quelques aspects généraux qui me semblent importants à soulever à la lumière de mon expérience au sein du Parlement européen où j'ai présidé pendant 5 années la commission des droits de la femme. Ces aspects sont les suivants :

(1) La nature du mariage entre l'homme et la femme, inscrit dans la loi naturelle et telle que préconisée dans l'éthique sociale universelle se voit à présent menacée, au niveau européen, sous le prétexte de la non discrimination fondée sur l'orientation sexuelle ou le genre, et la Charte des droits fondamentaux.

(2) La promotion de la régulation des naissances connait aujourd'hui un développement critiquable à travers la politique de la santé reproductive financée par le budget de l'Union européenne.

(3) Le non respect de la différence et de la complémentarité entre les femmes et les hommes conduit à la nécessité de combattre la violence à l'égard des femmes.

Des budgets importants sont utilisés par les institutions européennes pour combattre la violence à l'égard des femmes. Pourtant, l'éducation des garçons par leurs pères  au sein de la cellule familiale fonctionnelle, qui respecte la dignité de la personne, peut éviter des programmes coûteux des institutions européennes et nationales.

(4) La dictature des experts posait déjà un problème au Pape Paul VI lors de l'élaboration de l'Encyclique Humanae Vitae.Il eut le courage de désavouer le travail insuffisant des groupes de travail composés d'experts éminents.

Aujourd'hui, dans l'Union européenne, une véritable expertocratie est le synonyme de l'influence des puissants lobbies qui ne représentent pas le bien commun, comme c'est le cas pour l'Agence des droits fondamentaux, censée surveiller la mise en œuvre de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

(5) La "culture du compromis", qui pose le compromis comme point de départ avant toute négociation, ne permet plus aujourd'hui de respecter le point 73 d'Evangelium Vitae, ni la note doctrinale des chrétiens engagés en politique. Jean Paul II nous rappelait, au point 52 de Véritatis Splendor, que l'homme peut s'interdire d'accomplir certains actes surtout lorsqu'il est prêt à mourir plutôt que de faire le mal.

La négociation politique est par conséquent souvent mal comprise, notamment chez les hommes et les femmes du groupe chrétiens-démocrates, dont je fais partie.

 

(III) Responsabilité individuelle et responsablilité collective

(6) Mais ceci impose préalablement la formation de la conscience et de l'action collective et individuelle. Notre responsabilité individuelle et collective est engagée à tous les niveaux et dans toutes les positions d'influence dans lesquelles nous nous trouvons, de nos cuisines à la maison familiale jusqu'à la tribune d'une assemblée politique internationale.

Mais tout citoyen a aussi l'obligation de se faire entendre auprès des décideurs politiques pour les informer sur les décisions qu'ils prennent lors du vote dans l'hémicycle parlementaire.

Vous et moi, chacun à son niveau, nous avons le devoir de rappeler à temps et à contre temps, avec diplomatie et détermination, que l'Homme ne peut pas indéfiniment prendre la place de Dieu.

Chers amis, pour ne pas perdre courage face aux interlocuteurs, nous devons garder à l'esprit qu'aucun groupe social, par exemple un parti politique, et aucune idéologie, n'ont le droit d'usurper le rôle de guide unique.

Cela comporte la destruction de la véritable subjectivité de la société et des personnes-citoyens, comme cela se produit dans tout totalitarisme.

Aujourd'hui, nous sommes appelés à combattre d'autres formes de totalitarismes. Tous, ils visent un même but: la négation de l'intégrité de la personne humaine.

Cependant, des nombreuses références juridiques internationales promeuvent la famille, le droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de la personne, ou encore le droit de se marier et de fonder une famille pour l'homme et la femme, sans aucune restriction quant à la race, la nationalité ou la religion.

Ces textes juridiques internationaux établissent clairement que "La famille est l'élément naturel et fondamental de la société et a droit à la protection de la société et de l'Etat", que "la maternité et l'enfance ont droit à une aide et à une assistance spéciales" et que les parents ont le droit de choisir le genre d'éducation à donner à leurs enfants.

Ces affirmations ne sont pas subjectives. Elles sont clairement inscrites depuis 1948 au cœur de la Déclaration Universelle des droits de l'Homme dont nous venons de fêter le 60e anniversaire.

 

(IV) Il est possible d’agir

Pendant mon premier mandat au Parlement européen de 2004 à 2009, il a été possible de mener un certain nombre d'actions législatives.

J'ai pu par exemple présenter un rapport d'initiative sur la "non discrimination basée sur le sexe et la solidarité entre les générations".

Ce rapport souligne le rôle essentiel du père de famille, le rôle particulier des jeunes retraités et souligne que "la reconnaissance du travail non marchand est une question de justice afin que soit reconnu le travail non marchand des femmes et des hommes en matière de solidarité entre les générations".

 Dans ce contexte, ce rapport demande de promouvoir une équité fondée sur la contribution des personnes et la vraie liberté de choix.

 Certains peuvent penser que la famille est une construction de l'État moderne dont les charges se limitent à l'alimentation et à "la prise en charge" des enfants - mais peu au-delà.

Mais c'est le contraire : la famille est la plus ancienne institution de l'Humanité, la cellule de base de l'Humanité est naturelle et n'a pas été crée par un acte législatif.

C'est pourquoi je voudrais maintenant vous faire part de toute une série de bonnes nouvelles pour la vie et la famille que j'ai pu mener avec de nombreux amis sur tous les continents, au cours de cette législature:

En 2004, nous avons organisé la célébration du dixième anniversaire de l'année internationale de la famille, finalisée par la déclaration de DOHA adoptée par la résolution 59/11 de l'Assemblée générale des Nations Unies lors de sa 59e session, le 6 décembre 2004.

Plusieurs centaines de citoyens de nombreux pays d'Europe participaient à cette célébration. Il a ensuite été possible de mobiliser les politiques lors du forum interparlementaire de Varsovie qui s'est tenu le 12 Mai 2007 à l'occasion du 4e congrès mondial pour la famille, sous le haut parrainage du président du Sénat et du président du Parlement de la République de Pologne.

 La Déclaration des Parlementaires à l'occasion de la Journée internationale des familles (15 Mai 2007) "demande aux gouvernements respectifs de réaliser pleinement les actes juridiques internationaux pour la vie et la famille, ainsi que d’analyser, planifier et mettre en œuvre toutes les politiques et actions servant le bon fonctionnement, le développement et la promotion de la famille".

Forts de ces expériences, dans la perspective du 60e anniversaire de la déclaration universelle des droits de l'homme, nous avons organisé à Strasbourg, un an avant cet anniversaire la rencontre européenne des mouvements pour la vie et la famille désireux de se réunir en coalition pour se mobiliser sur les objectifs ciblés dans la déclaration de Doha.

La rencontre de Bratislava, dans mon pays la Slovaquie, fut organisée les 24-25 octobre 2008. Cette réunion interculturelle a été le fruit d'une collaboration efficace avec l'Institut international de Doha pour les études de la famille et le développement de la Fondation du Qatar.  

Enfin, le 17-18 décembre 2008, les représentants des mouvements pour la vie et la famille ont eu l'honneur d'accueillir à Strasbourg Son Eminence le Cardinal Ennio Antonelli, à la fin de leur journée de travail sur leurs projets pour la vie et la famille qui ont été développés tout au long l'année internationale de l'apprentissage des droits de l'homme du 10 décembre 2008 au 10 décembre 2009.

Voilà quelques exemples très concrets des activités politiques que nous organisons au Parlement européen. Leur but est d'encourager les associations et les décideurs politiques de faire une alliance pour la famille.

Après tout, il y eut l'époque de la confusion des genres. Maintenant ce doit être le temps de la priorité pour la famille.

 (V) La famille, cellule de base de la société

 Monsieur le Président, chers amis de la famille,

 La famille est le lieu où nous devrions apprendre que le rôle authentique de l'Etat est de servir ses citoyens.

L'Etat ne doit pas réinventer l'humanité selon les principes d'une idéologie artificielle changeante: L'effondrement de la famille basée sur le mariage entre un homme et une femme signale l'arrivée du totalitarisme.

Toutefois, ce modèle se voit aujourd'hui mis à rude épreuve par le biais d'une modernité mal comprise dont l'Etat et ses institutions se fait l'avant coureur.

La question se pose alors de savoir quelles bases légales nous adoptons pour permettre à la famille d'être la cellule vitale de la société. Je constate que la définition de la famille comme l'union d'un homme et une femme unis par le lien indissoluble du mariage et leurs enfants ne fait pas partie de l'acquis communautaire.

Quelles orientations politiques les institutions compétentes nationales et internationales adoptent-elles pour soutenir la famille ?

La clause la plus favorable promue par Mme Halimi entre parfaitement bien dans une stratégie destructrice. Le législateur souhaite séparer le couple et diviser la famille sous prétexte d'une meilleure égalité des chances. Mais au bout du compte, il faudrait réfléchir à l'objectif global qui est le bien commun.

En effet, la promotion sociale de la famille se voit beaucoup influencée par l'attention politique que nous y conférons. A titre d'exemple, je mentionnerai les nombreuses résolutions d'initiative que le Parlement européen vote pour condamner sans équivoque la famille naturelle au profit d'autres formes de vie commune. Le prétexte est toujours le même : le respect des droits fondamentaux, la promotion des minorités, la non discrimination fondée sur le sexe ou l'orientation sexuelle.

La toute récente résolution de ce type, votée au cours de la séance plénière du mois de septembre 2009 à Strasbourg visait la Lituanie [1].

La Lituanie fut condamnée parce qu'elle voulait protéger les mineurs d'une sexualisation grandissante de la publicité.

Certains groupes d'influence se sont immédiatement saisis de ce prétexte pour accuser la Lituanie de violation du principe de non discrimination fondée sur l'orientation sexuelle.

Pour un simple amendement à sa loi d'éducation nationale, la Lituanie compromettait sa position d'Etat membre de l'Union européenne.

Il est vrai que ces résolutions d'initiative du Parlement européen sont dépourvues de tout effet juridique contraignant, mais leur existence même répand une ambiance malsaine qui n'aide pas à établir une solidarité européenne à l'égard de la famille.

Face aux évolutions du droit communautaire, il me semble que la famille incarnerait désormais plutôt un enjeu de survie avant d'être un enjeu de solidarité.

 

VI Les conséquences du traité de Lisbonne

 

Le Traité de Lisbonne a modifié la redistribution des compétences dans le domaine de la famille grâce à la coopération transfrontière.

 

Ce glissement s'opère par le Chapitre III du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne consacré à la coopération judiciaire en matière civile.

 

Le Conseil de l'Union européenne qui regroupe les ministres nationaux en fonction de leur portefeuille peut désormais prendre des décisions relevant du droit de la famille ayant une incidence transfrontière.

 

Cette procédure institutionnelle vise la "harmonisation communautaire du droit civil international" sans que le mot "famille" ne se fasse entendre.

 

Pourtant, dans tous les Etats membres, le mariage est un acte régi par le code civil.

 

Par conséquent, la redéfinition du mariage par les institutions européennes pourra se justifier par les aspects transfrontières et par l'harmonisation du droit civil entre les Etats membres en mettant en œuvre la Charte des droits fondamentaux de l'Union européen.

 

Même si des mécanismes de contrôle ont été introduits (comme par exemple l'unanimité au Conseil, le droit de véto d'un seul Parlement national, la consultation du Parlement européen), il ne peut plus être ignoré que le droit de la famille fait désormais parti des décisions européennes.

 

Avec l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, la Charte des droits fondamentaux devient juridiquement contraignante.

 

Or cette Charte défie les principes de la loi naturelle par l'absence remarquable, et remarquée, de la définition de la famille et par le statut particulier conféré au droit de l'enfant.

 

L’article 9 de la Charte stipule que "le droit de se marier et de fonder une famille sont garantis selon les lois nationales qui en régissent l'exercice"[2].

 

Les rédacteurs de la Charte se gardent de spécifier le sexe des conjoints et dissocient de manière explicite la notion de mariage de celle de famille.

 

Les "Explications relatives à la Charte des droits fondamentaux" clarifient sans appel que "Cet article n'interdit ni n'impose l'octroi du statut de mariage à des unions entre personnes du même sexe." [3]

 

Je signale également que l'article 24 de la même Charte est consacré aux droits de l'enfant et omet volontairement la mention du père et de la mère au profit de la mention "des deux parents".

 

L’article 21 de la Charte consacre également le principe de non discrimination fondée, notamment, sur le genre et l'orientation sexuelle.

 

Le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne stipule dans l'article 10 que l'Union veille à la cohérence entre ses différentes politiques et actions.

 

Cela veut dire dans notre cas : toute harmonisation du droit communautaire dans le domaine de la famille doit impérativement prendre en considération l'absence de définition de famille et le principe de non discrimination fondée sur le genre et l'orientation sexuelle.

 

Dès lors, la défense de la famille basée sur le mariage entre un homme et une femme devient un véritable objectif stratégique, car le législateur européen et les Chefs d'Etat et de gouvernement ont volontairement omis une définition précise de la famille.

 

Pour conclure, Monsieur le Président, chers amis de la famille,

 

Je vous demande très honnêtement: est-ce que nous, citoyens attachés aux racines et aux valeurs chrétiennes de l’Europe, sommes-nous aussi clairvoyants pour promouvoir la famille dans un langage institutionnellement neutre et policé selon les besoins du fonctionnement administratif communautaire ?

 

Toutes les manières d'agir sont efficaces pour autant qu'elles servent à obtenir l'objectif posé. Il faut toujours se souvenir qu'il est facile de commencer un projet, mais il est plus difficile de l'accomplir correctement, sans l'abandonner à mi-chemin.

 

L'Union européenne a besoin des citoyens qui s'engagent. Les sociétés européennes ont un fonds culturel commun, mais il existe également des héritages historiques et donc des traits culturels spécifiques propres à chaque société.

 

Aujourd’hui émergent des facteurs de convergence culturelle : le droit et les institutions sont marqués par une tendance à l’homogénéisation.

 

Nous le remarquons notamment dans l'Union européenne incarnée par les institutions implantées à Bruxelles.

 

C'est pourquoi je souhaiterais insister sur la nécessité de revendiquer un droit de regard des gouvernements nationaux et des assemblées nationales sur les questions de l'éthique, du mariage et de la culture de la vie.

 

Parce que nos différentes cultures partagent les mêmes valeurs articulées autour d'un héritage national propre, l'Union européenne ne doit pas s'en mêler.

 

Un dernier point, pour conclure, concerne la méthode.

 

Une Europe multiculturelle composée de cultures différentes et des mêmes valeurs nécessite, par définition, plusieurs manières d'agir.

 

Agir en politique dans un environnement multiculturel est comparable à un jeu d'équipe parfaitement masculin et parfois un peu brutal : le rugby.

 

Si un joueur de rugby n'apprend pas à passer le ballon, il va bien vite être bloqué par l'équipe en face. Il a beau être le plus fort et le plus connu de tous les joueurs du monde. Face à 15 joueurs, il sera bloqué et son équipe perdra le ballon.

 

En politique, c'est pareil, surtout si nous travaillons dans un domaine interculturel.

 

Il nous faut apprendre à avancer ensemble, à nous passer le ballon et à reconnaître quand l'opposition est trop forte pour changer notre propre stratégie.

 

Bien sûr, chacun peut jouer individuellement pour soi, mais nous n'allons pas gagner ainsi, et l'histoire le démontre.

 

[1] Résolution du Parlement européen du 17 septembre 2009 sur la loi lituanienne relative à la protection des mineurs contre les effets néfastes de l'information publique, 17.09.2009,
http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?type=TA&reference=P7-TA-2009-0019&language=FR&ring=P7-RC-2009-0026

 [2] http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:C:2007:303:0001:0016:FR:PDF

[3] http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:C:2007:303:0017:0035:FR:PDF

 

 


La politique familiale et l’Europe

 

Mon élection à la présidence de Famille et Liberté m’a permis de mieux comprendre pourquoi sur des questions essentielles comme la définition et la place de la famille dans notre société, ceux qui participent au pouvoir législatif ou exécutif ont une vision déformée de ce qu’en pense le public.

 

D’un côté des groupes de pressions bien organisés, je leur reconnais volontiers ce mérite, bénéficiant de la faveur des médias, par connivence idéologique ou parce qu’ils annoncent du nouveau, généreusement subventionnés par la collectivité et affranchis des scrupules judéo-chrétiens peuvent consacrer tous leurs efforts à la satisfaction de leurs désirs narcissiques.

 

De l’autre côté des associations, les unes assumant des responsabilités concrètes d’information et de formation des familles sans toujours disposer du temps nécessaire pour faire partager leur riche expérience, les autres, dont Famille et Liberté fait partie, développant des analyses et des réflexions intéressantes sans avoir les moyens de les faire connaître largement.

Les élus soumis, directement ou par l’intermédiaire des médias, à la pression de minorités activistes et égoïstes sont insuffisamment informées de l’action, et même de l’existence d’associations comme les nôtres. De leur côté les associations gagneraient à être mieux informées des projets législatifs.

C’est dans cette intention que Famille et Liberté a proposé aux associations qui agissent pour la famille une rencontre avec Stéphane Buffetaut, ancien député européen, membre du Comité économique et social européen et rapporteur d’un avis sur La famille et l’évolution démographique adopté par le Comité en 2007.

 

L’adoption de cet avis par 120 voix pour, 1 voix contre et 5 abstentions est dû pour une grande part aux convictions de M. Buffetaut en faveur de la famille et au talent avec lequel il a su les faire valoir. Il reflète aussi une évolution des esprits et une prise de conscience, que l’on peut juger bien tardive, de la question démographique, reconnue comme : « un des plus importants défis que l’Union européenne devra affronter au cours des prochaines années».

 

Si au sein de la Communauté européenne la politique familiale est en principe du ressort des Etats et le resterait après l’adoption du traité de Lisbonne, on commettrait une grave erreur en pensant que les institutions européennes n’ont pas d’influence, bonne ou mauvaise, sur les politiques familiales des Etats membres.

 

Le texte suivant sur la politique familiale et l’Europe réunit des informations recueillies lors de notre rencontre avec M. Buffetaut et d’autres informations sur l’orientation des institutions européennes pour que chacun puisse agir auprès d’elles.

Christian Vanneste

 

Communication de la Commission européenne

Cette communication d’octobre 2006 porte sur le vieillissement de la population européenne et ses conséquences.

 

Selon les projections retenues, il pourrait y avoir, en 2050, dans l’Union européenne deux personnes en âge de travailler pour une personne de 65 ans ou plus alors que la proportion actuelle est de quatre pour une.

 

Cette projection, terrifiante si l’on considère la situation peu enviable d’un grand nombre de retraités aujourd’hui, alors que quatre actifs cotisent pour chacun d’eux, n’est pas tombée dans l’oubli grâce à la présidence allemande de l’Union, en 2007, et particulièrement à son ministre de la famille, Ursula von der Leyen, qui ont saisi le Comité économique et social.

 

Avis du Comité économique et social européen

Après avoir montré que la famille est « source de prospérité économique, de solidarité sociale et d’équilibre affectif », le Comité économique et social propose la signature d’un Pacte européen pour la famille entre les Etats membres comprenant les engagements suivants :

 

  • Mise en place de politiques répondant aux attentes de la population sur le nombre d’enfants souhaités.

  • Fixation d’un plancher de budgets publics consacrés aux enfants et à la famille.

  • Conciliation de la vie familiale et professionnelle.

  • Engagement de permanence des mesures précédentes.

     

  • Si l’avis a été voté à une très large majorité, ses suites se font encore attendre. C’est ainsi que les crédits qui devaient financer l’observation des politiques familiales n’ont pas été versés et que les pays qui ont assuré la présidence de l’Union après l’Allemagne n’ont pris aucune initiative dans le sens de la politique familiale.

    Résolution du parlement européen[1]

    Le parlement européen vient d’adopter une résolution sur les droits fondamentaux dans l’Union européenne[2] qui ignore le fait familial, sous prétexte de «lutter contre les stéréotypes familiaux sexistes» et promeut l’avortement, sous le nom de «droit à la santé génésique». 

    La résolution demande également que les Etats membres appliquent le principe de reconnaissance mutuelle pour les couples homosexuels, qu’ils soient mariés ou en partenariat civil enregistré, et invite les Etats membres qui ne l'ont pas encore fait à prendre, au nom du principe d'égalité, des mesures législatives visant à surmonter la discrimination subie par certains couples en raison de leur orientation sexuelle.

    Les majorités qui soutiennent de telles propositions forment un assemblage hétéroclite de libertariens, généralement anglo-saxons, de féministes à tout crin, plutôt scandinaves ou de verts malthusiens qui prétendent affranchir l’individu de la famille, et de la majorité des élus de gauche qui veulent, pour son bien naturellement, l’assujettir à l’Etat.

    L’entrée dans l’Europe des pays de l’Europe centrale est une occasion de contrebalancer cette coalition. L’occupation soviétique a appris à leurs ressortissants à se méfier de l’Etat tout puissant et leur a permis de constater que l’on échappait moins difficilement à son étreinte en famille qu’isolément.

    Il est à cet égard significatif que la présidence Tchèque de l’Union qui vient d’entrer en fonction ait prévu un conseil des ministres de l’Union sur la famille en février.

    Ceux qui souhaitent être informé des projets des institutions européennes, de façon à intervenir auprès des élus, peuvent s’abonner gratuitement à la liste de diffusion d’euro-fam : http://euro-fam.org/

    [1]

      http://eescopinions.eesc.europa.eu/EESCopinionDocument.aspx?identifier=ces/soc/soc245/ces423-2007_ac.doc&language=FR
    [2] http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P6-TA-2009-0019+0+DOC+XML+V0//FR&language=FR

    Lettre 55 – décembre 2008